vendredi 11 mai 2012

Le Président de la République chef des armées 2-La Ve République


En apparence, l’article 15 de la Constitution de 1958 (« Le Président de la République est le Chef des Armées. Il préside les conseils et comités supérieurs de la Défense nationale », sans préciser quelles sont les compétences qu’il exerce à ce titre) est peu différent de l’article 33 de la Constitution de 1946. De plus, l’article 19 (« Les actes du président de la République autres que ceux prévus aux articles 8 (1er alinéa), 11, 12, 16, 18, 54, 56 et 61 sont contresignés par le premier ministre et, le cas échéant, par les ministres responsables. ») ne fait pas référence à l’article 15. Les actes du Président de la République en conseil de défense doivent donc normalement être contresignés par le Premier ministre. Si on ajoute l’article 20 (« le gouvernement dispose de l’administration et de la force armée ») et l’article 21 (« Le Premier ministre dirige l’action du gouvernement. Il est responsable de la Défense nationale ») de la Constitution mais aussi l’article 7 de l’ordonnance de 1959 (« la politique de défense est définie en conseil des ministres ») et son article 9 (« le Premier ministre, responsable de la Défense nationale, exerce la direction générale et la direction militaire de la Défense »), on obtient quelque chose de proche de l’esprit de la IIIe ou de la IVe République. Le général de Gaulle ne l’interprète pas de cette façon dans ses Mémoires d’espoir (« Il va de soi, enfin, que j’imprime ma marque à notre défense […] cela pour d’évidentes raisons qui tiennent à mon personnage, mais aussi parce que, dans nos institutions, le Président répond de « l’intégrité du territoire » [art.5], qu’il est « le Chef des Armées », qu’il préside « les conseils et comités de Défense nationale » »).

Le décret du 14 janvier 1964 « relatif aux forces aériennes stratégiques » décidait que le Président de la République avait seul qualité pour décider l’emploi du feu nucléaire, ce qui était en contradiction avec les dispositions de la Constitution et de l’ordonnance de 1959. Ce décret a été abrogé et remplacé par celui du 12 juin 1996 plus conforme aux textes constitutionnels et législatifs (mais le conseil de défense ne fait qu’y « définir les conditions » d’engagement alors que le Président « donne l’ordre »).

Lors de la guerre du Golfe (août 1990- février 1991), le gouvernement pose la question de confiance selon l’article 48.1 devant l’Assemblée nationale et demande au Sénat l’approbation d’une déclaration de politique générale (art 49.4) mais le Président dirige les opérations seul laissant à l’écart le Premier ministre et le ministre de la Défense qui finit par démissionner.

La reconnaissance d’un pouvoir entier et personnel du Président de la République comme chef des Armées ne peut plus être niée. La question a été tranchée dans ce sens par le Comité consultatif pour la révision de la Constitution dans son rapport du 15 février 1993. Le comité, tout en jugeant discutable l’expression « domaine réservé », a estimé que ; malgré certaines ambiguïtés, l’exercice de pouvoirs propres en matière de défense par le Président de la République correspondait à une « tradition trentenaire ». En conséquence, il avait proposé de modifier l’article 21 de la Constitution comme suit : « Le Premier ministre dirige l’action du gouvernement. Il est responsable de l’organisation de la Défense nationale. » La tradition est ainsi devenue une source de droit en matière constitutionnelle à condition de justifier d’une application « paisible » pendant une certaine durée.

Fiche au chef d'état-major des armées, 2007

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